Le samedi 26 janvier s’est tenu à Vertical’Art Rungis un séminaire sur les nouveaux financements des clubs.
L’idée était dans un premier temps de faire le point sur ce qu’allait changer pour nous la mise en place de la nouvelle gouvernance du sport, et dans un second temps d’explorer différents modèles de financements de club testés via un partage d’expériences.
La nouvelle gouvernance du sport
Dans une première intervention, Sylvie Viens, directrice technique nationale adjointe à l’animation territoriale, nous a expliqué comment allait être articulée la nouvelle gouvernance du sport avec la création au 1er mars 2019 de l’Agence Nationale du Sport.
Pour l’heure, les statuts de l’agence sont encore en cours de rédaction et les informations restent parcellaires. Cependant, Sylvie Viens a pu apporter son éclairage sur de nombreux points qui sont d’ores et déjà actés ou en passe de l’être.
Le président du conseil d’administration de cette nouvelle structure est déjà nommé, il s’agit de Jean CASTEX, ainsi que son directeur qui sera Frédéric SANAUR.
Les deux grands objectifs de l’agence sont les suivants :
- développer la haute performance, notamment dans la perspective des JO de Paris 2024 (pour lesquels un cap de 80 médailles a été fixé) ;
- développer la pratique sportive dans deux domaines :
- les pratiques sportives fédérales avec une première enveloppe financière dédiée
- les pratiques sportives territoriales avec une seconde enveloppe financière dédiée
Cette agence sera constituée sous la forme d’un groupement d’intérêt public qui réunira les 4 catégories de partenaires intervenant dans le monde du sport : l’Etat, les fédérations sportives délégataires, les collectivités territoriales et les représentants du monde économique.
La répartition annoncée du budget pour 2019 est la suivante :
- 90 millions d’euros pour la performance ;
- 141 millions d’euros pour le développement des pratiques (somme à partager entre toutes les fédérations).
A terme, l’objectif affiché est de laisser aux fédérations sportives la responsabilité de la redistribuer en leur sein les enveloppes financières dans le cadre des objectifs de politique publique fixés par l’Agence.
En ce qui concerne les subventions aux clubs et entités de la Fédération, plusieurs évolutions peuvent êtres notées :
- les subventions versées jusque-là par le CNDS seront désormais gérées et reversées par l’Agence (le CNDS étant supprimé),
- la constitution probable d’un seul type de dossier de financement,
- le renforcement de la pratique sportive interdisciplinaire avec des subventions pour répondre à cet objectif. En effet, le projet est de renforcer la coopération intra et interdisciplinaire afin de promouvoir la découverte d’autres activités sportives et d’augmenter significativement le nombre de pratiquants en France.
En ce qui concerne les subventions « grands équipements », la FFME exprime de fortes inquiétudes car toutes les fédérations n’ont pas le même mode de fonctionnement, ni les mêmes problématiques. Il demeure aussi une incertitude quant aux modalités du partage budgétaire avec les collectivités territoriales car elles seront également représentées au sein de l’Agence.
Les fédérations sportives recevront une enveloppe budgétaire qu’elles devront probablement déléguées au niveau régional (Ligues) et au niveau départemental (comités territoriaux). Dans ce cadre, chaque fédération devra rédiger un projet sportif à décliner jusqu’au niveau des clubs. Tous ces points doivent cependant encore faire l’objet de précisions.
On peut encore citer parmi les différentes pistes de réflexion de l’agence le projet de verser un salaire aux athlètes de haut niveau préparant les JO.
Durant cette année de transition, les commissions territoriales du CNDS continueront de gérer les subventions c’était le cas jusqu’ici.
Dans ce contexte, le ministère du sport est amené à évoluer ; il y a notamment des incertitudes quant au devenir des directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS). Le ministère continuera à fixer les axes stratégiques pour la pratique interfédérale et conservera un rôle d’observation, d’analyse, de contrôle et de règlementation en matière sportive et de sécurité dans la pratique.
L’Etat étant garant de la sécurité de ses citoyens, des délégations seront attribuées aux fédérations pour leur permettre la délivrance de titre, mais également d’assurer la sécurité des pratiquants.
Actuellement, le ministère rencontre toutes les fédérations et étudie quel niveau de sécurité sont prépondérants par activité (ex : l’alpinisme demande un niveau de sécurité maximum, mais pour l’escalade sur SAE, quel niveau est exigé ?). Si le niveau de sécurité exigé est élevé, c’est alors l’Etat qui devrait continuer à être chargé des formations et de la délivrance des qualifications professionnelles.
Aujourd’hui, l’encadrement contre rémunération qui exige de l’encadrant d’être titulaire d’un titre professionnel permet de s’assurer d’un certain niveau de sécurité. Cependant, si la sécurité est moins problématique il pourrait être envisagé de pouvoir rémunérer des bénévoles titulaires de certains brevets fédéraux.
En termes de gouvernance, les clubs devraient élire au scrutin direct les présidents de leurs fédérations. La pondération du vote serait ajustée en fonction de la taille du club.
Enfin, l’incertitude subsiste quant au devenir des 1600 conseillers sportifs dans les fédérations qui ont le statut de fonctionnaire (conseillers techniques, directeurs techniques, etc.) : leurs postes actuels seront garantis jusqu’en 2024. Par la suite, il pourrait être question de les transférer au sein des différentes fédérations en leur attribuant une enveloppe financière pour assurer leur embauche.
Le financement des clubs (Léa Delin, FFME)
Dans le contexte de diminution des subventions, la question de la pérennité du financement des clubs se pose avec acuité. Pour y apporter des éléments de réponse, la FFME a mis en place un groupe de travail sur les financements des clubs à l’automne 2018.
Ce groupe se composait de 6 membres du comité exécutif, 2 représentants des CT, et 6 représentants des clubs.
Le groupe s’est fixé 3 objectifs :
- Mettre à disposition des clubs les pratiques et idées de financements qui ont fait leur preuve ;
- Etudier les possibilités d’améliorer ces pratiques et d’innover en la matière ;
- Améliorer les échanges sur les retours d’expérience dans un souci d’entraide.
Les financements actuels repérés :
- Les sources de financement des clubs sont toutes différentes car elles dépendent souvent des territoires dans lesquels ils sont implantés
- La cotisation des adhérents est très variable en fonction de l’implantation géographique du club, elle est en moyenne de 82€ en France.
- Particularité des clubs en IdF : le coût des salariés en IdF explique que les cotisations y sont plus importantes (40€/heure TTC (équivalent au tarif d’un professionnel de 12€/heure TTC) – Il faut faire attention à l’embauche des travailleurs indépendants ; si leur emploi est régulier, il y a un risque qu’il soit requalifié lors d’un contrôle fiscal.
- Il est à craindre que les subventions diminuent considérablement dans les années à venir
- La mise en place de partenariat/mécénat est peu développée
- Les prestations de services à l’externe, les évènements organisés par les clubs et la ventes d’article de sport viennent compléter les sources de financement d’ores et déjà utilisées par les clubs
Des pistes de travail :
- Se rendre attractif en proposant des activités différentes de celles du privé
- Si la prestation fournie par le club est de qualité, elle doit être rémunérée à sa juste hauteur
- Identifier les grimpeurs consuméristes : faire éventuellement une déduction sur la cotisation des grimpeurs impliqués dans le club
- D’autres financements possibles :
- ouverture des salles aux non-adhérents
- mutualisation des emplois dans un groupement d’employeurs
- Aujourd’hui on se rend compte que tout est proposé gratuitement dans les clubs d’escalade alors que dans d’autres fédérations ce n’est pas le cas : exemple des passeports judo que les parents payent…
- Soigner le réseautage (notamment avec les élus des collectivités), exemples : présence au Téléthon, développement de la handi-escalade, évènement à la semaine du sport…)
- Inciter les échanges entre les clubs : partage de créneaux, de sorties entre clubs
- Créer des fiches pratiques pour informer et former les présidents
Gestion d’une salle à visée lucrative par un club, et Mécénat (Françoise Ducoeur, FFME)
Cas de Chambéry Escalade :
Chambéry Escalade est un club affilié à la FFME composé de 600 adhérents et 4 salariés. La ville de Chambéry a signé une convention de mise à disposition de la SAE de bloc municipale avec le club. Le club cohabite et partage les créneaux avec un important club FFCAM.
Ce modèle de gestion est inspiré du club Mineral Spirit de Valence.
Comment cela fonctionne-t-il ?
Le club génère des recettes pour son fonctionnement et le développement de l’activité en ouvrant la salle à des non-adhérents. Fiscalement, les recettes ne doivent pas excéder 66000€/an.
Pour ouvrir à un public autre que les adhérents du club, il y a bien sûr des règles à respecter :
- Publicité interdite
- Les produit doivent être bien identifiés, et le public parfaitement ciblé ;
- Les prix proposés ne doivent pas s’approcher des tarifs de la concurrence privée et inclure la TVA ;
- Les pratiquants étant non-licenciés, il faut impérativement prendre une assurance bien spécifique à cette activité lucrative ; celle-ci est assez peu onéreuse
- Il est impératif de tenir une comptabilité isolée hyper précise en fléchant parfaitement les activités club et les activités lucratives
Concrètement comment ça se passe ?
- Le créneau proposé est de midi et 14H avec la présence de salariés du club
- Le tarif est de 9€ de base, puis des réductions sont appliquées : 7€ si licencié ou étudiant, et 6€ pour les moins de 12ans. En comparaison, les salles de bloc commerciales voisines proposent leur entrée à 14€.
Adhésion club avec part de mécénat :
Comment cela fonctionne-t-il ?
L’idée de ce modèle de financement est de proposer aux adhérents d’inclure un don défiscalisable dans le prix de leur adhésion. Cette solution est intéressante pour les deux parties et s’adresse à ceux qui payent l’impôt sur le revenu (pas de crédit d’impôt). 66% du don est défiscalisé.
Ce système peut également être proposé pour les inscriptions à une compétition.
L’idée est de proposer un niveau de cotisation similaire aux adhérent qui prennent l’option avec ou sans mécénat.
Pour pouvoir proposer le mécénat, l’association doit être reconnue d’intérêt général et être habilitée à délivrer des reçus fiscaux.
Exemple :
Sans mécénat :
- 190€ adhésion adulte simple, dont :
- 50€ de licence
- 140 € d’adhésion au club
Avec mécénat :
- 290€ adhésion adulte simple dont :
- 50€ de licence
- 120€ de don au club (dont 80€ seront défiscalisés)
- 110€ d’adhésion au club
Ce qui donne un coût d’adhésion final de 190€ pour l’adhérent (avec la réduction d’impôt)
Expérience de Matthieu Boulard, président du CT 75 et du club Le 8 Assure :
Pour pouvoir prétendre au mécénat, il faut être déclaré d’intérêt public et/ou d’intérêt général.
Fonctionnement financier du club :
- Pas de subvention.
- Cotisation de 250 à 490€.
- Tous les cours sont encadrés, pas de pratique libre.
- Le club a mis en place une convention avec ses compétiteurs qui ont l’obligation d’aller expliquer leur pratique dans des entreprises
- Le club dégage également quelques recettes d’inscriptions lors de sa compétition annuelle.
- le club paye à la mairie la location de la SAE (26000€/an)
Cas des stages de vacances :
Pour dégager des recettes supplémentaires, le 8 Assure utilise toutes les semaines des vacances scolaires pour organiser des stages d’escalade.
Il s’agit de stages proposés aux non-membres à 250€/semaine de 5 demi-journées, soit 2 stages par semaine, un le matin (9h-midi) et un l’après midi (13h -17h) avec un maximum de 18 participants par créneaux. Comme pour Chambéry Escalade, le club a dû contracter auprès d’Allianz une assurance spécifique pour cette activité lucrative. Ces stages rapportent au club 25 000€ par an.
Sponsoring :
Pensez-y, c’est défiscalisé pour les entreprises !
Un budget de 100 000€ pour un gros évènement ne coutera que 40 000€ à l’entreprise.